La diversité linguistique est-elle toujours une chance ?

Il y a de nombreux avantages à la diversité linguistique, mais aussi quelques conditions à considérer.

Un article paru le 31 mars 2021 sous ce titre dans le journal Le Temps a attiré mon attention.

Signé par deux professeurs (Christelle Dumas et Thierry Madiès) et un post-doctorant (Brice Nkoumou Ngoa) de l’Université de Fribourg, l’article explique que dans les pays industrialisés « la maîtrise de plusieurs langues serait généralement favorable à la croissance économique et permettrait de bénéficier de revenus plus élevés sur le plan individuel ».

Selon certaines estimations, le PIB (Produit Intérieur Brut) de la Suisse serait de 10 % plus élevé en raison du multilinguisme de notre pays, tandis que la Grande-Bretagne perdrait 3,5 % de son PIB du fait que ses habitants parlent peu ou pas les langues étrangères.

Diminution des coûts de communication et confiance mutuelle renforcée entre partenaires économiques expliqueraient cela selon les auteurs de l’article. « Le multilinguisme rendrait en outre les pays plus attractifs pour les investisseurs étrangers ».

J’aime personnellement les langues et garde un excellent souvenir des années passées à enseigner le français langue étrangère à l’Ecole Lémania (1976-1997). J’ai toujours considéré que la maîtrise d’une langue étrangère est la meilleure façon de comprendre une autre culture, de découvrir sa richesse et d’échanger avec ceux qui la vivent de l’intérieur.

Au cours de mes voyages dans divers pays, j’ai souvent constaté que le contact avec les habitants est bien différent si l’on parle leur langue, et particulièrement quand celle-ci est rarement apprise par des étrangers, comme le grec moderne par exemple.

Si j’étais parfaitement conscient que les compétences linguistiques ont une grande importance dans un CV et qu’elles ont un impact significatif sur les salaires, je n’avais en revanche jamais soupçonné qu’elles puissent avoir un tel impact au niveau macroéconomique. Cet article a donc été pour moi un « eye-opener ».

Je suis donc toujours plus convaincu de l’utilité d’acquérir d’autres langues que sa langue maternelle et ne peux qu’encourager chacun et chacune à se lancer dans l’apprentissage d’une langue étrangère.

Mais pourquoi le titre de cet article comporte-t-il un point d’interrogation ?

La multitude de langues parlées en Afrique, infiniment supérieure à ce qu’elle est en Suisse, est source de richesse culturelle pour les populations, mais crée aussi des difficultés de coordination et de communication et « renvoie à la fragmentation ethnique, facteur de conflits et de division ». Un arbitrage entre richesse culturelle et efficacité économique semble donc nécessaire. Ainsi, les auteurs de l’article prônent en conclusion le choix de langues régionales officielles pour renforcer les échanges.

 

Photo: Man vyi, Public domain, via Wikimedia Commons

Philippe Du Pasquier